
" L'état méditatif est atteint lorsque les mecanismes de l'esprit cessent " Jiddu Krishnamurti "
L'art de la Méditation : L'état d'être :
Dans la quête de l’état d’être, une multitude de pratiques s’offre à nous : exercices de respiration profonde, méditations guidées, exercices de concentration, vidéos et audios de relaxation, sophrologie, Yoga Nidra, et bien d’autres. Cette diversité reflète la richesse de l’expérience humaine et trouve son explication dans la nature même de la conscience, comme l’enseignent les Védas. Chaque individu, en raison de son karma et de son constitution mentale et physique uniques, répond différemment aux outils disponibles.
Cependant, il est essentiel de comprendre que ces pratiques, bien qu’efficaces et précieuses, ne sont que des moyens, et non la finalité. Elles ne représentent pas l’état d’être en lui-même, mais des outils adaptés pour guider l’esprit vers une dissolution progressive de ses fluctuations. Ces approches modernes, bien qu’apparemment divergentes, partagent une intention commune : nous conduire à la reconnaissance de notre nature essentielle, au-delà du mental et des illusions.
"La méditation est comme une rivière ; chacun y entre par un point différent, mais tous s’approchent de l’océan de la Vérité."
Le développement personnel : une passerelle vers l’étude de soi (Svadhyaya) :
Dans la voie du Yoga, Swadhyaya (l’étude de soi) est considérée comme une pratique sacrée, l’un des cinq Niyamas (principes de discipline intérieure) Cette étude agit comme un pont entre notre expérience extérieure et notre intériorité profonde, nous amenant à une compréhension plus fine de nos conditionnements et de notre véritable nature.
Le développement personnel moderne, dans une certaine mesure, peut être vu comme une adaptation de cette tradition. Cependant, pour que cette démarche soit authentique, elle doit dépasser les simples mécanismes de l’ego. Et ici, une précision importante s’impose : l’ego n’est pas une entité indépendante vivant en nous. Il n’est pas une "chose", mais plutôt une somme de croyances, de conditionnements, et d’identifications que nous avons accumulés.
Comprendre le mental et ses composantes : l’Anthahkarana
De même, il n’existe pas d’entité nommée "mental" habitant en nous. Dans la philosophie védique, ce que nous appelons le "mental" est désigné par le terme sanskrit Anthahkarana (l’instrument intérieur), qui se compose de plusieurs éléments :
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Ahamkara (l’ego) : La tendance à s’identifier à une idée de soi-même, basée sur des croyances et des expériences passées.
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Samskaras : Les empreintes résiduelles laissées par nos actions passées, qui conditionnent nos pensées et comportements présents.
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Vasanas : Les désirs latents ou inclinations profondes qui façonnent nos aspirations et nos attachements.
Ces composantes, combinées aux trois Gunas (qualités fondamentales de la nature : Sattva, Rajas, et Tamas), forment l’illusion de la réalité, appelée Maya.
Maya : l’illusion qui voile
Maya, la grande illusion, est ce voile qui obscurcit notre perception de la vérité ultime (Brahman). Elle naît de l’interaction des trois Gunas (Sattva, Rajas, Tamas) et des composantes de l’Anthahkarana. Sous son influence, nous percevons une dualité là où il n’y a qu’unité.
Cette illusion nous emprisonne dans le champ de l’action (Karma Kshetra), où nous sommes perpétuellement ballottés entre les paires d’opposés : plaisir et douleur, gain et perte, succès et échec, amour et haine.
Cette oscillation constante engendre une souffrance multiforme qui peut être classifiée en trois types principaux :
- Adhyatmika (souffrance intérieure ou personnelle),sous l’influence de Maya, nous nous identifions à ces expériences corporelles et mentales, croyant qu’elles définissent notre existence.
- Adhibhautika (souffrance externe causée par les êtres vivants) en percevant les autres comme séparés de nous-mêmes, Maya renforce l’idée d’un monde duel où "l’autre" devient une source de douleur potentielle.
- Adhidaivika (souffrance cosmique ou divine), Maya nous amène à voir ces forces comme extérieures et hostiles, augmentant notre sentiment de vulnérabilité et d’impuissance.
"Le mental peut guider vers la porte, mais seul le silence intérieur permet de la franchir."
La méditation n’est pas l’accumulation de connaissances, mais le lâcher-prise de tout savoir. L’esprit, débarrassé de ses fluctuations, s’établit dans la tranquillité, et dans cette immobilité naît la réalisation du Soi.
L’accumulation de concepts autour de la méditation risque de renforcer les fluctuations du mental (chitta vritti), ce n’est qu’en transcendant ces concepts que l’état méditatif peut émerger. Cet état n’est ni une construction, ni une technique, mais une pure présence.
La méditation n’est pas une pratique parmi d’autres, mais un état naturel. Dans cet état, le mental s’efface et l’état d’être reprend sa juste place .
Souvent appelé comme Samadhi, cette état ne peut être conceptualisé. Les mots, bien qu’utiles pour enseigner, sont des outils limités. Ils portent en eux les traces de nos conditionnements individuels et collectifs, et risquent de détourner l’aspirant de l’expérience directe.
Le mental est à la fois un obstacle et un outil. Tant que nous courons après une idée ou un concept d’éveil, nous restons pris dans le domaine du mental, de l’ego et de l’illusion (Maya).
"L’état méditatif ne peut être recherché comme un objet. Tant que le chercheur court après un résultat, il tourne en rond dans le domaine du mental. Abandonner la quête est la voie vers l’Être."
Cela signifie que toute tentative de saisir la méditation avec l’intellect nous éloigne de sa véritable nature. Elle n’est pas un objectif à atteindre, mais une reconnaissance de ce qui est déjà présent, ici et maintenant L’essence de la méditation, est la simplicité de l’être. Elle ne nécessite pas d’efforts, mais un lâcher-prise total. Être est l’expérience ultime, un retour à notre nature essentielle. Lorsque nous cessons de courir après des concepts ou des résultats, nous réalisons que tout est déjà là, entier, parfait.

"Le Soi ne peut être connu par l’intellect, ni par l’agitation du mental. Il est réalisé dans le silence, lorsque le mental et l’ego se dissolvent."
Des pratiques comme le Yoga Nidra offrent une porte d’entrée précieuse, en enseignant à déposer le mental dans un corps immobile, créant ainsi un espace de profonde relaxation et d’introspection. La sophrologie, quant à elle, peut aider à déconstruire des croyances et des schémas profondément ancrés, favorisant une libération progressive des conditionnements. Les méditations guidées, de leur côté, sont un outil intéressant pour apprendre à tourner l’attention vers l’intérieur et commencer à explorer la tranquillité intérieure.
Cependant, il est essentiel de rester vigilant face à certaines limitations de ces pratiques, notamment lorsqu’elles reposent sur des instructions verbales ou une intellectualisation excessive. À force de s’appuyer uniquement sur des méditations guidées ou des discours, le mental peut tomber dans un looping, une boucle d’attachement à des concepts comme le calme, la paix ou l’amour.
Ce piège subtil peut mener à la création d’un "personnage spirituel", une identité fictive construite par le mental pour s’approprier ces états et les expériences associées. Ce personnage, bien que séduisant, devient une nouvelle illusion à laquelle on s’accroche, nous faisant croire que nous avons atteint un certain état de réalisation spirituelle, alors qu’il ne s’agit que d’une projection mentale.
La véritable exploration de l’état d’être exige de dépasser ces attachements et de transcender l’idée même d’un "moi" qui observe ou atteint quelque chose. Ce n’est qu’en lâchant prise sur toute tentative d’appropriation par le mental que l’expérience directe de l’être peut émerger, dans sa pureté et son absence de définition.
Cette réalisation ne se trouve ni dans le passé, marqué par nos Samskaras, ni dans le futur, où résident nos Vasanas.
Elle se manifeste uniquement dans l’instant présent, dans la pureté de la conscience libérée de Maya.
Les multiples voies disponibles aujourd’hui ne sont que des moyens de s’approcher de cette réalisation ultime. Elles s’adressent à nos divers besoins et conditionnements, mais leur objectif est toujours le même : nous ramener à notre essence, qui est immuable et infinie. En comprenant la nature de l’ego, du mental et de l’illusion, nous pouvons transcender les limitations de notre Anthahkarana et retrouver cet état d’être qui n’a jamais cessé d’être présent, ici et maintenant.

Les Obstacles Physiques dans la Méditation
Retour d'expérience Personnelle:
La méditation, bien qu’extraordinaire dans ses bienfaits, peut présenter des obstacles d’ordre physique, un défi que j’ai moi-même expérimenté intensément. Lors de mon séjour à l’ashram, nous passions la majeure partie de notre temps assis en tailleur, que ce soit pour les cours théoriques, les séances de pranayama ou les méditations matinales.
Au début, cette posture était un véritable calvaire pour moi. Malgré une surélévation de mes hanches pour réduire la tension, ma jambe se tétanisait au point de devenir insensible par moments. Mon dos était un amas de douleurs constantes, et des fourmillements envahissaient mes membres. Ces inconforts me semblaient insurmontables, à tel point que parfois, j'étais au bord des larmes après seulement 20 minutes.
Cependant, avec le temps, la pratique, et une meilleure compréhension du fonctionnement du corps, j’ai découvert que l’intelligence innée de notre organisme pouvait agir à tous les niveaux pour nous aider.
Le Corps, Mécanisme et constant changement:
Le corps humain n’est pas figé, il est en perpétuel mouvement, en constante régénération. Nos cellules, même osseuses, se renouvellent tout au long de notre vie. Ce que nous percevons comme rigide ou immuable est en réalité fluide et malléable.
Ce parallèle trouve une résonance fascinante avec l’idée que l’âme est éternelle et immuable. De manière scientifique, une partie de notre corps partage cette constance : nos yeux. Ils restent les mêmes tout au long de notre vie, ce qui les fait souvent désigner comme "le miroir de l’âme".
Si vous faites face à des douleurs, tensions ou inconforts pendant la méditation, ne vous inquiétez pas. Je peux vous affirmer, par expérience, que ce qui semble insurmontable aujourd’hui peut devenir naturel avec le temps et la pratique. Là où je trouvais insupportable de rester assise en tailleur plus de 20 minutes, je peux désormais, chaque année, durant la célébration de Mahashivaratri, rester dans cette position plusieurs heures d’affilée.
Votre corps possède une capacité incroyable d’adaptation et de régénération. À mesure que vous vous engagez régulièrement dans une pratique, il crée de nouveaux réseaux nerveux, cellulaires et veineux pour s’ajuster à vos besoins. En d’autres termes, il évolue en adéquation avec ce que vous lui proposez chaque jour. Laissez-lui le temps et l’espace pour s’adapter, et faites preuve de patience. La douleur initiale que vous ressentez n’est pas une barrière définitive, mais un signal de transformation en cours. Avec persévérance et douceur, le corps s’ouvre, se renforce, et devient le support idéal pour plonger dans les profondeurs de votre pratique méditative.
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